collodion numérique

Au temps du confinement de la COVID-19, il était très difficile de m’exercer en collodion puisque je ne pouvais pas faire de portrait d’amis ni de modèles. Les natures mortes ne m’intéressaient pas. J’ai été dans l’obligation d’adopter de nouvelles manières de faire pour poursuivre ma production en photographie. Dans un pareil contexte, l’imagination devient un phare pour concrétisations des idées délirantes. Surfant sur le NET, j’ai vu une technique dans laquelle des artistes prenaient des photos par l’intermédiaire de webcams ou de FaceTime. Je pense à Alessio Albi et Brenna Weeks qui proposaient des séances virtuelles avec des modèles qui demeurent à des milliers de kilomètres.

Dans cette perspective, avec l’application Skype, Shane Balkowitsch fixe son appareil à soufflet devant son ordinateur pour faire des portraits au collodion humide. Il a réussi à arrimer des procédés antiques avec la technologie numérique d’aujourd’hui. Il faut souligner que Balkowitsch n’est pas le premier à exercer cette technique, d’autres comme Gérald Figal, Tony Richards et Borut Peterlin avaient expérimenté et expliqué brièvement ce procédé sur Internet avant lui.

J’ai décidé de dupliquer des photos récentes prisent en numérique et de les transférer en collodion sur des plaques d’aluminium. J’ai construit un dispositif semblable à Balkowitsch et je me suis amusé à prendre des portraits au collodion. Contrairement à Balkowitsch et Borut dont leur temps d’exposition variait entre 30 et 60 secondes pour faire une plaque; mes prises de vue étaient davantage de 16 minutes! Oui, je ne me trompe pas, cette durée était interminable pour l’avoir vécu. J’utilisais un écran iMac de 2007 qui avait peut-être une luminosité moins grande (quoiqu’elle était à pleine puissante); mon objectif Hermagis no 7 210 mm était configuré à f3.4 (je n’avais pas « waterhouse stop »).

Le temps d’exposition parfait était entre 15,5 et 16 minutes selon les clairs obscurs de la photo numérique que j’avais mise en noir et blanc pour ne pas avoir de problématique avec la couleur en collodion.

Je crois important de souligner que cette technique enregistre une légère trame d’ordinateur sur la plaque; elle est visible lorsqu’on scanne la plaque que ce soit à 3000 ou 300 dpi (bien sûr avec un objectif dont la qualité est hyper nette; si l’objectif est un « soft focus », la trame est presque pas visible). Cette trame se voit lors d’un agrandissement à 100% dans un logiciel de photo sur ordinateur. Toutefois, sur mes plaques 5×7 pouces, cette trame est invisible à l’oeil nu, car je prenais des photos de 5×7 pouces à 300 dpi sur mon écran d’ordinateur. Si je transpose ma photo en JPEG 150 dpi, aucune trame n’est visible ou presque (sans grossissement). Avec un agrandissement sur papier, cette trame sera visible, c’est mon hypothèse.

Il y a eu très peu de retouches sur ces photos: contraste et efface principalement.

16 minutes exposition à f3.4. Julie et Arianne (le collodion a séché sur les côtés de la plaque. Cela donne un effet quand même très intéressant). Exposition de cette plaque à l’exposition bénéfique de Circa, art actuel (Montréal).

Ici, je trouve cette plaque assez intéressante pour deux raisons. La première, lors de la prise de vue de 16 minutes, l’écran d’ordinateur s’est éteint inopinément (quelques secondes, quelques minutes – 2 minutes max, je n’en sais rien). Ainsi, l’appareil a enregistré du noir (la trame de l’écran et/ou la saleté sur l’écran). Ma plaque a pris la teinte d’une couleur d’un jaune foncé sali. Je ne sais pas si mon dos laisse passé un peu de lumière. Deuxièmement, lorsque la plaque était dans un bac d’eau (tout de suite après l’avoir révélé 28 secondes, – mon révélateur n’était plus trop actif), j’ai échappé un peu de solution de mon bain de sel d’argent mon bac d’eau, ce qui pourrait expliquer les tâches en haut à gauche de ma plaque. Ces tâches fonctionnent bien dans le ciel, ce qui n’aurait pas été nécessairement le cas sur une autre image.

 

Il y a plusieurs petits points noirs sur l’épreuve (très visible sur la robe). Il semble que ce soit des particules qui sont dans le collodion. La chimie était fraichement faite: elle avait 2 jours; il est préférable de laisser reposer une chimie neuve 3-4 jours. À souligner que lorsqu’une chimie neuve est beaucoup plus sensible (au révélateur et à la lumière lors de la prise de vue). Exemple, normalement les prises de vue de mes épreuves avec un collodion plus vieux (quelques semaines) est de 16 minutes. Avec un collodion fraîchement réalisé (1 ou 2 jours), c’est de 8 ou 9 minutes.

8 min, solarisation avec un flash de cellulaire en chambre noire à 7 sec du développement (révélateur).

 

J’ai pris un rejet (une plaque ratée) et j’ai fait plusieurs essais afin d’obtenir des effets intéressants et expérimentaux. J’ai mis plusieurs couches de fixateur sur la plaque. Cependant, les traces du fixateur restaient pour la plupart transparentes et cela même après une ou deux semaines. J’ai alors concentré le fixateur avec plus hyposulfite et j’ai déposé cette nouvelle solution sur ma plaque couchée. Il y a eu plus d’effets givrés, mais encore trop transparents à mon goût. La coloration de cet effet a pris toute son importance lorsque la plaque fut chauffée avec un séchoir. Cependant, lorsque je met le vernis pour préserver la plaque, la couleur s’atteint et redevient transparent. Les seuls éléments visibles sont les traces de matière et relief sur la plaque.

 

EXPÉRIMENTATIONS:
Dans les 5 prochaines plaques de collodion, j’ai cherché à salir mes images. Ce qui n’a pas fonctionné comme je le voulais. J’ai remplacé l’eau distillée par de l’eau de pluie trouvée dans la rue. Sur certaines photos, on peut observer des petits points noirs qui s’apparente à une solution de sel d’argent qui est contaminée. Avec un sel d’argent neuf (hydromètre et pH vérifié), un collodion frais de 4 jours, le temps de mes poses est passé de 16 minutes à 1 ou 2 minutes. La raison: mon ancien collodion était vieux de quelques mois (moins sensible) et mon sel d’argent était contaminé (pH1 au lieu de pH4). J’apprends avec mes erreurs, j’en fais tout le temps et je cause mes accidents.

Pour faire cet effet vaporeux, il faut agiter fortement de gauche à droite les chimies dans tous les sens (révélateur et fixateur). Cet effet est possible uniquement quand l’image a un noir intense dans le fond. Pour cerner l’effet vaporeux vers le centre de l’image, laissez la plaque dans le fixateur et les contours seront plus noirs.